Par Denise Normand-Guérette
Responsable du dossier éducation, Société de recherche en orientation humaine. Professeure associée, Département d’éducation et formation spécialisées, UQÀM

Lors de la rentrée de leur enfant au préscolaire, les parents sont conscients que ce dernier franchit une nouvelle étape de sa vie. Bien que plusieurs aient fréquenté la garderie, le début à l’école est, pour les parents, à la fois source d’ambition, de rêves, mais également de questionnement et parfois même d’inquiétude. Combien de parents souhaiteraient être de petits oiseaux pour pouvoir observer comment leur fils ou leur fille se débrouille à l’école ?

Les enseignantes ont observé, durant une recherche-action réalisée en classe maternelle, que certains enfants avaient tendance à démontrer leur insatisfaction à l’égard de leur travail, et même à le détruire, par exemple lors d’activités d’écriture ou de la réalisation de dessins. Cette situation a été discutée au cours de rencontres organisées entre parents, enseignante et chercheure afin de comprendre les attitudes des enfants et de chercher comment les amener à surmonter leurs difficultés.

Plusieurs enfants étaient habitués à recevoir beaucoup d’aide à la maison lors de la réalisation de différentes activités et ainsi à obtenir des résultats très satisfaisants ainsi que des félicitations de la part des adultes. En classe, l’enseignante travaille avec un groupe et ne peut apporter un soutien individualisé aussi constant que celui auquel l’enfant est habitué à la maison. De plus, lorsque l’enfant exécute une tâche d’écriture, il peut comparer ce qu’il a fait à la démonstration effectuée par l’enseignante et constater alors l’écart entre les deux tracés. Insatisfait de sa production, il chiffonne sa feuille et ne veut plus poursuivre l’activité.

Afin d’aider les enfants à persévérer pour améliorer leurs tracés, parents et enseignantes ont décidé de faire une expérience avec eux. À l’école, l’enseignante a écrit sur le tableau et, à la maison, les parents se sont servis d’une feuille. Du côté droit, ils ont utilisé leur main droite pour écrire plusieurs mots, et à gauche, ils ont écrit les mêmes mots avec la main gauche. Puis, ils ont questionné les enfants sur les différences qu’ils
observaient entre les deux colonnes. Ces derniers ont constaté que les lettres étaient bien tracées d’un côté et beaucoup moins bien de l’autre. Les adultes ont expliqué que la main qui faisait de belles lettres était celle qu’ils utilisaient pour écrire depuis qu’ils étaient petits et qu’elle s’était beaucoup entraînée pour devenir habile. L’autre main ne s’était pas entraînée, et c’est pourquoi les lettres étaient moins belles. À partir de cette expérience très concrète, il a été plus facile d’expliquer aux enfants la nécessité de s’entraîner afin de pouvoir développer leurs capacités. Par la suite, une enseignante a entendu un enfant dire à son camarade qui se décourageait au cours de la réalisation d’une tâche : « Il faut se pratiquer ».

La concertation entre parents et enseignantes a permis de transmettre un message cohérent dans les deux milieux de vie des enfants. En s’appuyant sur cet exemple concret, il a été possible de s’y référer dans différents contextes pour rappeler aux enfants l’importance de fournir des efforts, de se « pratiquer » et de persévérer malgré les difficultés afin de développer leur potentiel. Pour favoriser cette concertation, il a été essentiel d’établir une relation de confiance entre parents et enseignantes, ce qui nécessite une reconnaissance de part et d’autre des connaissances et de l’expérience de chacun ainsi qu’un respect mutuel. De plus, un autre élément contribue au rapprochement, celui de
partager un objectif commun, car chacun veut apporter un soutien aux enfants dans le but de favoriser leur épanouissement personnel et le développement de leurs compétences.