Entrevue par Anne D. Mc Donald, rédactrice de Familléduc
 

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots? Avec qui travaillez-vous?

Sylvain Lajoie, je cumule 40 années d’expérience comme éducateur spécialisé. J’ai travaillé 24 ans en centre jeunesse. Depuis 16 ans, je suis intervenant en zoothérapie à Zoothérapie Québec à Montréal. Notre mission vise à développer, à promouvoir et à offrir des programmes et des services de zoothérapie qui utilisent le chien pour contribuer à l’amélioration de la santé et de la qualité de vie des personnes de tout âge et de toute condition.

Notre clientèle est variée. En fait, nos services s’adaptent à la clientèle et au milieu. Nous pouvons aller un peu partout où un besoin en zoothérapie est identifié. À Zoothérapie Québec, j’ai des collègues travailleurs sociaux, éducateurs, psychologues, etc. L’équipe est multidisciplinaire parce qu’il faut envoyer le bon intervenant dans le bon milieu. Nous travaillons tous avec les chiens, parce que nous nous déplaçons dans les milieux, et le chien est l’animal le plus adapté à cette formule.
 

Qu’est-ce que la zoothérapie?

Pour parler de zoothérapie, il ne suffit pas d’être en présence d’un animal, il faut être dans une approche thérapeutique menée par un professionnel de la santé accompagné d’un animal auprès d’un individu. Nécessairement, il y a un sens clinique derrière mon travail. Lorsque je suis appelé à rencontrer un bénéficiaire, j’ai un mandat et je suis inscrit dans son plan de soin.
 

Est-ce que ce sont vos chiens?

Je ne travaille pas avec mes chiens, mais avec les 25 chiens de Zoothérapie Québec. Bien que les chiens appartiennent à l’organisme, ils ne peuvent pas vivre au bureau. Ce qui est assez unique! Les chiens sont hébergés dans des familles d’accueil qui ont la responsabilité de venir porter et chercher l’animal au bureau. À la fin de la journée, nous souhaitons que les animaux retrouvent leur vie de famille et, à la retraite, le chien restera aussi dans sa famille.
 

Avec quelle race de chien travaillez-vous?

Je travaille avec plusieurs races de chiens, de différents formats et de différentes fourrures, du yorkshire au bouvier bernois. Cette belle bande de chiens me permet de choisir l’animal qui conviendra le mieux à l’intervention. Si je dois aller faire une rencontre active pour stimuler la motricité du bénéficiaire, je vais choisir un chien plus joueur, plus animé. Si je travaille sur le plan affectif, je vais choisir un chien plus calme qui aime se faire flatter. C’est à moi comme intervenant de choisir l’animal qui soutiendra le mieux mon intervention.
 

Pouvez-vous me parler de votre travail avec la clientèle gériatrique?

En gériatrie, je travaille toujours avec deux chiens. Dans mon approche d’intervenant, le chien est un facilitateur, car il me permet de créer un lien plus rapidement avec les usagers. Je peux faire mon intervention avec plus de facilité parce que les chiens m’accompagnent. Toutefois, la zoothérapie n’est pas une panacée. Si la personne n’aimait pas les chiens à 23 ans, elle ne les aime pas à 83 ans.

Comme intervenant, je vais souvent travailler avec les résidents que les établissements rejoignent moins facilement avec les activités : les clientèles qui ont des besoins particuliers, les personnes les plus démunies, isolées ou plus atteintes dans leur démence ou leur maladie. Je suis un professionnel de la santé qui arrive à titre de ressource externe en soutien à des interventions ou à des accompagnements déjà mis en place dans le milieu. Le plus souvent, je cherche à mettre les gens en action sur les plans sensoriel, moteur ou cognitif selon les besoins.

J’adapte mes interventions. Si la personne est au lit, je vais avoir une approche plus affective. Les chiens vont être couchés avec elle, blottis. Parfois, la personne a la capacité de flatter l’animal; d’autres fois, je vais assister le contact et prendre la main du bénéficiaire. Quelquefois, juste la présence des chiens suffit à éveiller ceux qui ont de bons souvenirs avec les animaux. Ça peut aider dans l’humeur aussi. Je peux amener les chiens pour jouer dans le lit, pour apporter de la vie, du mouvement.

Avec des usagers plus mobiles, si j’ai l’autorisation et que l’état de santé de la personne le permet, je normalise une situation avec les chiens et nous allons faire une marche dehors ou nous nous promenons avec les animaux dans l’établissement.

Je peux aussi intervenir avec les chiens en groupe ou en sous-groupe dans le cadre d’un atelier de socialisation. Ce n’est pas parce que les gens vivent ensemble qu’ils se parlent. Donc, nous nous rassemblons autour des chiens pour entrer en contact et discuter en groupe pour que les bénéficiaires apprennent à se connaître.

Je vois les mêmes personnes une fois par semaine pour 15 à 30 minutes. Je poursuis les entretiens dans le temps. C’est là que la vraie relation d’aide s’installe. J’apprends à connaître mes gens et je peux adapter mes interventions au contexte et faire évoluer la relation.
 

Quel impact a la zoothérapie auprès de vos clientèles aînées?

La clientèle gériatrique est rarement en contact avec les animaux, et le premier impact positif que je constate est la joie. L’amour qu’on peut porter à un animal est viscéral et, souvent, il y a un manque dans la vie des gens en résidence. Quand j’arrive avec mes chiens, même si la personne sait que je ne suis là que pour 15 à 30 minutes, il y a beaucoup de joie. Je travaille avec deux gros soleils!

En général, ma clientèle est très souffrante et je n’ai pas d’objectif thérapeutique à long terme. J’ai un objectif situationnel : je cherche à faire une différence sur le moment. Ma satisfaction est de constater de la détente, de l’apaisement, des rires, des pleurs peut-être, mais je vois que c’est un moment qui a fait du bien. Je souhaite qu’après mon départ le bien-être perdure, mais les bienfaits à long terme ne sont pas assurés en raison de l’état de santé des aînés avec qui je travaille.

Les partenaires qui croient en cette approche me permettent de faire la différence dans la vie des personnes qui reçoivent mes services. Ce n’est pas une solution miracle, mais lorsque la zoothérapie dessert le bon bénéficiaire, ça fait la différence. Faire de la zoothérapie, ça dépasse l’amour des animaux, car c’est l’humain qui reste au cœur de nos interventions. On fait ça pour aider l’humain qui est dans le besoin.

 


Pour plus d'information :

7779, avenue Casgrain, Montréal (Québec) H2R 1Z2
514 279-4747 /
info@zootherapiequebec.ca

zootherapiequebec.ca